Que dit SBTi dans son dernier rapport sur les crédits carbone ?
Ce document synthétise le rapport de la Science Based Targets initiative (SBTi) sur l'utilisation des crédits carbone dans les stratégies climatiques des entreprises. Basé sur un appel à témoignages, le rapport examine l'efficacité des crédits carbone, leurs cas d'utilisation par les entreprises et les allégations associées. Cette analyse vise à éclairer la révision du standard Net Zéro de SBTi prévue pour 2025, en abordant des questions cruciales sur l'intégrité et l'impact des marchés volontaires du carbone.
Par Constance Groisne, Responsable Décarbonation chez Inuk

Inuk est une jeune entreprise française, spécialiste de la contribution carbone. Dans le cadre d'un programme de l'European Institute of Technology, Inuk a développé en 2018 la première technologie de traçabilité appliquée au crédits carbone. Nous proposons aux entreprises des crédits carbone made in Europe parmi les plus fiables du marché. Nos équipes accompagnent aussi au quotidien des entreprises de toute taille dans leur transition bas-carbone.

Ce document est une synthèse du rapport de SBTi sur l'utilisation des crédits carbone. Il se veut factuel et impartial, seules les notes en vert reflètent un ajout de l'équipe d'Inuk sur le sujet.
Contexte et objectifs du rapport SBTi
En 2023, la Science Based Targets initiative (SBTi) a lancé un appel à témoignages ambitieux pour collecter des informations sur l'intérêt et l'efficacité des Environmental Attribute Certificates (EACs), dont font partie les crédits carbone. Dans un premier rapport intitulé "Evidence Synthesis Report - Part 1 : Carbon Credits" publié en juillet 2024, SBTi dresse la synthèse des sources recueillies concernant les crédits carbone d'évitement et de réduction.
L'objectif principal de ce rapport SBTi est de synthétiser et d'analyser les "éléments de preuves" soumis en réponse à cet appel. Les apprentissages sont regroupés au sein de trois thèmes :
  1. L'efficacité des crédits carbone
  1. Les cas d'utilisation des crédits carbone par les entreprises et leurs conséquences pour la transition net-zéro et la finance climat
  1. Les allégations liées à l'utilisation des crédits carbone
Cette recherche approfondie jouera un rôle crucial dans la révision en cours du standard Net Zéro de SBTi, dont la nouvelle version est attendue pour 2025. Elle vise à fournir une base solide pour améliorer l'intégrité et l'efficacité des stratégies climatiques des entreprises. Les principales conclusions sur chacune des 3 thématiques sont résumées ci-dessous.
1. L'efficacité des crédits carbone : des résultats hétérogènes et des méthodologies qui doivent être améliorées
Le premier thème du rapport SBTi se concentre sur l'efficacité réelle des crédits carbone de réduction et d'évitement. Il cherche à déterminer si un crédit carbone représente véritablement une tonne de CO2e réduite ou évitée, et s'il existe des conditions opérationnelles ou des caractéristiques spécifiques des projets qui influencent leur efficacité.
L'analyse de 41 éléments de preuves sur ce thème révèle des conclusions divergentes :
  • 19 sources soulignent le manque d'efficacité de certains types de crédits carbone
  • 12 sources sont plutôt optimistes quant à leur efficacité
  • Les projets REDD+ montrent des résultats particulièrement contrastés, probablement en raison de la complexité inhérente à la modélisation de la déforestation future.

En d'autres termes, il est plus difficile de démontrer l'efficacité de crédits carbone pour certains types de projets, notamment les projets forestiers pour lesquels la temporalité et le scénario de référence peuvent être complexes à définir. A l'inverse, les projets soutenus par Inuk peuvent être monitorés de manière précise : la donnée est claire, suivie quotidiennement par un compteur, et les émissions évitées immédiates et permanentes (arrêt du recours aux énergies fossiles).
Malgré cette analyse, les preuves ne permettent pas d'identifier clairement des caractéristiques ou des conditions opérationnelles qui seraient systématiquement associées à des crédits carbone ou des projets efficaces. Cette diversité de résultats souligne la nécessité d'une approche plus nuancée et approfondie dans l'évaluation de l'efficacité des crédits carbone.
SBTi conclut également qu'il existe un besoin urgent d'amélioration des méthodologies pour garantir que les crédits carbone reflètent précisément l'atténuation qu'ils prétendent délivrer. Des efforts ont déjà été réalisés sur plusieurs dimensions clés, notamment la mesurabilité, l'additionnalité, la permanence et la gestion du "carbon leakage". Cependant, la diversité des crédits carbone, des méthodologies et des types de projets examinés limite la possibilité de tirer des conclusions générales, soulignant la nécessité d'examiner un nombre plus important de preuves.
Plusieurs propositions récurrentes ont émergé pour améliorer l'intégrité des marchés volontaires du carbone et les méthodologies associées :
  • Mise en place d'un suivi actif et utilisation d'un scénario de référence dynamique pour tenir compte des facteurs émergents pendant la durée du projet
  • Augmentation des "buffer pools" pour assurer la permanence des projets forestiers
  • Adoption de méthodologies et de sélection de données conservatrices
  • Implémentation de "robust accounting provisions" pour éviter le double comptage des réductions d'émissions
  • Développement de méthodologies de comptabilité reconnaissant la valeur des actions réduisant le risque de perte de carbone

La technologie de traçabilité développée par Inuk permet de répondre à toutes ces recommandations, et va même plus loin, en inscrivant de manière permanente les caractéristiques de chaque crédit carbone, rendant sa duplication ou son double-comptage impossible.
Ces propositions visent à renforcer la crédibilité et l'efficacité des crédits carbone, garantissant ainsi leur rôle positif dans la lutte contre le changement climatique.
2. Utilisation des crédits carbone par les entreprises : une approche de "contribution" à préférer à de la "compensation"
Le rapport SBTi examine trois cas d'utilisation principaux des crédits carbone par les entreprises, chacun ayant des conséquences différentes pour la transition net-zéro et la finance climat :
Offsetting
Il s'agit de l'achat de crédits carbone pour des activités en dehors de la chaîne de valeur de l'entreprise, dans le but de compenser ses propres émissions. SBTi ne soutient pas cette approche, considérant que ces crédits ne peuvent pas être utilisés pour atteindre les objectifs d'atténuation de l'entreprise.
Insetting
Cette méthode implique l'achat de crédits carbone pour des activités au sein de la chaîne de valeur de l'entreprise. Elle permet d'orienter le financement vers des partenaires de la chaîne de valeur et d'éviter la vente de crédits à des tiers. Le standard Net Zero de SBTi ne mentionne pas spécifiquement l'insetting en raison du manque de consensus sur sa définition et les bonnes pratiques à appliquer.
Beyond Value Chain Mitigation (BVCM)
Cette approche consiste à acheter des crédits carbone pour des activités en dehors de la chaîne de valeur, en complément de la réduction des émissions propres de l'entreprise. SBTi recommande cette méthode dans son standard Net Zéro. Les entreprises peuvent utiliser la BVCM soit pour compenser leurs émissions résiduelles (après atténuation), soit pour contribuer à l'effort global d'atténuation climatique.

SBTi recommande d'utiliser les crédits carbone dans le cadre d'une stratégie de décarbonation engagée, avec la mise en place d'actions d'envergure. Son approche BVCM enjoint chaque entreprise à contribuer à l'effort global d'atténuation climatique, via des crédits carbone de qualité.
L'étude de SBTi a examiné 31 éléments de preuves concernant l'utilisation des crédits carbone par les entreprises. Les résultats mettent en lumière des perspectives contrastées :
  • 7 éléments semblent favorables à la compensation (offsetting), mais présentent des limites importantes, telles que des échantillons restreints ou des hypothèses discutables sur l'évolution du prix des crédits carbone
  • 14 éléments sont explicitement critiques envers l'offsetting, dont 8 préconisent les approches de BVCM/contribution comme modèles préférables pour augmenter l'atténuation et la finance climat
SBTi conclut que l'utilisation des crédits carbone dans une démarche de compensation présente des risques clairs, pouvant potentiellement entraver la transformation vers le net zéro et réduire la finance climat. En revanche, les approches de BVCM/contribution apparaissent comme des modèles plus prometteurs pour accélérer la transition et stimuler la finance climat.
Cependant, SBTi souligne la nécessité de compléter cette étude avec davantage d'éléments de preuves, notamment en ce qui concerne l'insetting. Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer pleinement l'impact de ces différentes approches sur les stratégies climatiques des entreprises et leur contribution à l'atténuation globale du changement climatique.
1
Risques de l'offsetting
Peut entraver la transformation net zéro et réduire la finance climat
2
Potentiel du BVCM
Approche préférable pour accélérer la transition et stimuler la finance climat
3
Besoin de recherche
Nécessité d'études supplémentaires, notamment sur l'insetting
4
Évaluation d'impact
Importance d'analyser l'effet des différentes approches sur les stratégies climatiques
3. Allégations liées aux crédits carbone : des termes parfois confus, dont l'utilisation peut avoir des conséquences encore mal comprises
Le troisième thème du rapport SBTi se concentre sur les allégations que les entreprises peuvent ou ne peuvent pas utiliser de manière crédible lorsqu'elles achètent des crédits carbone. Ce sujet est en constante évolution, avec des efforts croissants de la part des autorités publiques pour réguler les allégations environnementales.
L'analyse de 19 éléments de preuve a révélé plusieurs points clés :
  • Absence d'études quantitatives abordant directement ce sujet
  • Toutes les preuves de tier A (les plus fiables) remettent en question la légitimité des allégations de compensation
  • 9 des 19 preuves soutiennent explicitement l'utilisation d'allégations de contribution plutôt que de compensation
  • Confusion et désaccords sur la signification de certains termes, notamment la "neutralité carbone"
SBTi souligne la nécessité d'améliorer notre compréhension scientifique des implications que l'utilisation de crédits carbone dans les allégations climatiques peut avoir sur les comportements des entreprises et des consommateurs. Cette analyse met en évidence le besoin d'une plus grande clarté et d'une standardisation des termes utilisés dans les communications liées au climat.
Limites de l'analyse et perspectives
Le rapport SBTi reconnaît plusieurs limites importantes dans son analyse des crédits carbone :
  • Représentativité limitée des répondants : sur 421 réponses, 95 provenaient d'entreprises, mais seulement 4 d'académiques ou d'institutions de recherche
  • Échantillon restreint : seuls 71 éléments ont été étudiés, ce qui peut ne pas refléter l'ensemble des connaissances disponibles sur le sujet
  • Exclusion de sources potentiellement pertinentes qui n'ont pas été soumises lors de l'appel à témoignages
Ces limitations soulignent la difficulté d'établir des conclusions définitives et généralisables. Les résultats présentés doivent donc être considérés comme partiels et subjectifs, ouvrant la voie à des recherches plus approfondies.
Pour renforcer la validité et l'applicabilité de ces conclusions, SBTi recommande :
  1. D'élargir la base de données en incluant une plus grande diversité de sources et de parties prenantes
  1. De mener des études quantitatives spécifiques sur l'efficacité des différents types de crédits carbone
  1. D'approfondir la recherche sur l'impact des allégations liées aux crédits carbone sur le comportement des entreprises et des consommateurs
  1. De travailler à l'harmonisation des définitions et des méthodologies dans le domaine des marchés volontaires du carbone
Ces efforts permettront d'affiner les recommandations pour la révision du standard Net Zéro de SBTi et d'améliorer l'intégrité globale des stratégies climatiques des entreprises.

Inuk est une jeune entreprise française, spécialiste de la contribution carbone. Dans le cadre d'un programme de l'European Institute of Technology, Inuk a développé en 2018 la première technologie de traçabilité appliquée au crédits carbone.
Nous proposons aux entreprises des crédits carbone made in Europe parmi les plus fiables du marché. Nos équipes accompagnent aussi au quotidien des entreprises de toute taille dans le leur transition bas-carbone.
Pour en savoir plus, c'est ici.